« Et alors ? »
« Alors quoi ? » le vieux tendait avidement
la main, le jeune homme posa une pièce d’argent en soupirant dans la paume qui
se referma aussitôt.
« Ah cet alors ? Et bien Bellamy, s’il fut jamais
un grand marin, devint un féroce pirate. Il avait l’estime d’Hornigold, il
parlait bien, l’équipage avait peur de lui et de sa trogne, sans parler de sa
sauvagerie dans les assauts. Des fois, paraîtrait qu’il a même tué des gars de
chez nous…Mais c’était un chic type, toujours prêt à donner un coup de main et
apprendre de nouvelle chose. Sans se faire d’amis, il était respecté, même si
toujours il était plus froid qu’un glaçon de la Cordillère des Andes. Ça oui.
Un tueur froid et violent, on aurait dit qu’il s’animait qu’au combat, et là,
fallait le voir…Il tranchait et taillait un chemin sanglant mieux que
quiconque, et pour un gars qui avait jamais tenu une arme de sa vie, il s’en
tirait très bien. Ça me rappelle ce combat pour prendre le Lacrima
Christi… »
***
Hornigold avait fait mander Bellamy. Ils chassaient depuis quelques temps au large
des Bahamas, attendant une proie, qui venait d’apparaître à l’horizon. Un
vaisseau lourd, battant pavillon espagnol. Un négrier.
« Gamin, entre et assied toi. Du rhum ?» Hornigold
jouait avec un couteau dans sa cabine, en négligé, révélant une peau brune. Son
torse de bœuf était couvert de poils blonds de plus en plus striés d’argent.
Les années avec Hornigold avaient été bonnes, mais jamais Bellamy n’avait
oublié son serment. Il donnait la mort, mais un jour…Il rentrerait en France.
Il hocha la tête en signe de dénégation.
« A ta guise, mais ça fouette le sang avant un
combat…C’est pour ça que je t’ai fait venir. Il me faut un homme de confiance
pour prendre le château arrière…Genre toi, et quelques gars. »
« Ça sera fait. »
« Je le sais, mais je ne veux personne d’autre dedans.
Il y a un trésor caché dans ce bâtiment, plus que des nègres, et je veux pas le
rater, c’est clair ? Bien, alors prépare-toi. Au fait, si le Diable
ne nous emporte pas, le Lacrima Christi est à toi»
Congédié, Bellamy s’inclina avant d’aller prendre son poste.
***
Bellamy était féroce. Ses longs cheveux noirs étaient
retenus par un bandana de la même couleur. Sa chemise blanche avait viré au
rouge sous les explosions de sang. Ivre de sang et de carnage, il s’était
taillé un chemin avec quelques hommes, un grand Noir nommé Bombata qui maniait
la hache comme pas deux, Sylvio le Serpent et ses dagues, et le vieux Gebedia
qui adorait la poudre.
La voix rauque d’avoir trop hurlé et avalé la poudre, il
maniait son épée, un cadeau d’Hornigold, une large lame de boucanier qui
tranchait tout autant qu’elle piquait. Sa garde ouvragée était le résultat d’un
long travail d’un artisan espagnol qui s’était évertué à dessiner des roses qui
étaient maintenant teintées de rouges. Étrangement, cela faisait sourire
Bellamy d’avoir étrenné cette belle arme, fruit d’une rapine, sur des hommes de
sa majesté catholique. Son pistolet avait donné de la voix, mais lui avait aussi
servi à fracasser quelques crânes.
D’un coup de botte, il écarta le dernier homme qu’il avait
tué, presque un gamin qui avait à peine du poil au menton, avant d’enfoncer la
porte du château d’un coup de pied. Les cabines étaient sans dessus-dessous, il
descendit lentement, vers celle du capitaine. Verrouillée. Gebedia arriva, un
pistolet chargé à la main.
« Fais-toi plaisir le vieux » dit Bellamy, amusé.
Sans se faire prier, l’autre tira et fracassa le cadenas.
Dans le même mouvement, Bellamy enfonça la porte pour se retrouver…Face à une
belle femme aux cheveux d’or, qui tenait une dague à la main. Qui
était-elle ?
« Un pas de plus et je te tue, Gueux» elle était
espagnole, à n’en pas douter.
Bellamy posa son pistolet, en signe de paix, ainsi que son
épée.
« Je ne vous veux pas de mal Signora » il avait
répondu dans la même langue, ce qui eut l’agréable don de la troubler, et de
permettre à Bellamy après un bond de chat de lui saisir le poignet et de le
tordre. Elle lâcha la dague, mais la jeune femme lui sauta dessus, cherchant à
le mordre. La repoussant, l’homme aguerri par la mer la gifla d’un revers de sa
main gantée, ce qui la propulsa de l’autre côté de la pièce. A terre, elle lui
jeta un regard furieux tandis que du sang perlait à la commissure de ses lèvres.
« Madame, je ne vous veux vraiment aucun mal. Mais
recommencez cela, et je ne me retiendrai sûrement pas. » Il avait parlé
d’une voix dure, furieuse, l’autre ne répondit pas, sans être pour autant
mâter.
Un hurlement de joie se fit entendre au-dessus, ce qui fit
trembler le pont. Les pirates avaient vaincu, Hornigold descendit dans la
cabine.
« Belle prise mon ami. Et l’or ? »
Siffla-t-il en regardant l’espagnole.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire