mercredi 27 décembre 2017

Les flammes

Les flammes.
Un soir entre deux réveillons. Toutes les lumières sont éteintes sauf celles qui encerclent le sapin. Et des dizaines de bougies qui tamisent l’ambiance. Une heure propice à l’introspection et les plaisirs calmes. Mes yeux se perdent dans la flamme vacillante qui tournent aux gré de l’inspiration de l’air. Dehors, il pleut à verse, et les platanes vibrent sous les rafales de vent. Pas un temps à mettre un chat dehors. La buée s’incruste sur les vitres, dessinant de fantasques images, alors qu’un seul réverbère, dehors, allume la route. De temps à autre, une voiture qui file à toute vitesse dans la nuit vers un improbable réveillon, ou les sirènes bleues d’une ambulance vers un autre, plus tragique. Pourtant, dans ce petit cocon de salon, c’est la paix, le calme, et la volupté. Pourtant, malgré toute cela, je suis triste ce soir. Triste, à l’image de cette flamme qui vacille. Encore une autre dans les innombrables nuits où, debout, je broie du noir, je bois du noir et je craque mes maux.
A mes côtés, une autre flamme, tendre, calme, sereine, respire paisiblement, dans mes bras. Totem, elle apaise mes nuits d’encre. Sait-elle à quoi je pense ? A qui j’écris ? A qui je parle ? Tandis qu’elle dort, bienheureuse, au rythme tranquille de son cœur que j’entends battre ? J’ai tout pour être heureux, et pourtant, il y a toujours un vide. Un énorme trou dans mon cœur. Eternelle solitude, froid du sépulcre, chagrin insupportable. Un manque. Un vide. Un désespoir. Alors que mes nuits sont pleines de petites lumières qui vacillent, ou du souvenir de brasiers sur lesquels je me suis brûlé.
Ce rêve, ou était-ce une réalité ? Un feu d’artifice qui a cramé mes rétines, rendu mes oreilles sourdes et ma langue plus lourde que du plomb. Un choc. Un coup de poing. Un coup de couteau qui trancha jusqu’à la moindre des viscères, jusqu’au plus profond des nerfs, jusqu’à mon cœur qui explosa dans une bombe multicolore passionnée. Souffrance et plaisir, tandis que le rouge carmin de la violence et du sang s’évidait, fil d’Ariane sur une route baigné à ce cruel cruor. Pensamor, pince d’amour, clamp et aiguille pour rabibocher ce trou, mais la chirurgie à la poudre noire n’a fait qu’agrandir ce trou. Avec la soif d’inconnu et de nouvelles craintes. Brûlé à la lampe météore, je n’étais plus qu’un pantin de chiffon qui avançait, encore un peu, dans cette nuit noire.

 Pour tomber, un peu plus loin, sur une toute petite flamme, à vrai dire c’était plus une braise, un tout petit néon rouge grésillant, un petit bout de nez de clown. Un rire dans la nuit. Et soudain, à nouveau, l’espoir. Celui que je n’attendais plus. D’une braise, une flamme, puis un bûcher. Un incendie d’amour qui réchauffe le cœur, éclaire le noir, et repousse le trou dans ce cœur. Et pourtant, toujours des peurs, anciennes et ridicules. Peur que ce ne soit que de la poudre aux yeux, poudre de perlimpinpin, artifice, pétard qui sera mouillé trop vite. Peur de se dire qu’enfin, c’est bon, cette longue errance solitaire se finit ici. Peur de perdre cet être qui, au détour d’un chemin, pourrait s’en aller, dans sa liberté. Et me laisser seul à nouveau sur le carreau. A la recherche d’une flamme. Peur des autres lumières, mirages sur le désert de cette vie, ou météore bien réel, rencontre fortuite, qui pourrait me détourner de ces pas communs. J’ai peur, de tout, du blizzard, de te perdre, de me perdre. De rater un tournant. De faire un choix. De marché sur un chemin unique. Et pourtant, dans cette nuit, tandis que tu te presses contre moi, j’ai envie d’y croire. De chasser les idées noires. De ne garder que l’amour, totem.