lundi 25 mars 2013

Encre invisible

L’Ange, dans ce silence qui avait pris dans sa chape la salle, ne put s’empêcher d’éclater de rire. Il hoqueta tout d’abord, avant d’être pris de soubresauts dignes d’un fou, ce qui surprit passablement de monde. Puis il se calma, la larme à l’œil.
« Un bourgeois ? Mon maître un bourgeois ? C’est trop drôle. Décidément, je ne sais vraiment pas pourquoi je me suis embarqué avec le Capitaine Barbossa. Oui je joue ma vie, mais ma vie n’est rien face à celle de mon maître et ses plans »

L’Ange disait cela, très sérieux désormais, fixant Teague Sparrow de ses yeux noirs comme la nuit et sans plus regarder l’homme à la jambe de bois ou le vieillard qui avait parlé.

« Mon maître avait prévu vos doutes. Bien sûr, vous êtes habitués à Capétie et ses turpitudes, mais il sait bien que les Anglais vous détestent autant qu’ils détestent les Lys de France. Et il gage que s’il proposait une trêve aux anglais, ces derniers en profiteraient surement pour supprimer leurs pires ennemis, ceux qui les tournent sans cesse en ridicule.

Et même si vous avez…Diminué nos forces à Tortuga, vous savez très bien que tous vos navires ne tiendront pas le feu d’une escadre de vaisseaux de lignes. Mais ne prenez pas mes paroles pour une menace, ce sont que des constats. La France est forte mais gère un territoire trop grand. Vous avez de nombreux petits navires, et vous avez la capacité d’attaquer là où nos lourds vaisseaux ne peuvent pas aller. L’échange de mon maître est simple, or et provisions pour vus, contre l’assurance que vous n’attaquerez plus nos navires. Que voulez-vous de plus ? Des gages ?

Si mon maître voulez vos têtes, croyez-vous qu’il aurait envoyé un seul émissaire, qui n’est pas plus marin que le Capitaine Sparrow n’est évêque de Vera Cruz ? N’aurait-il pas au moins fait suivre son envoyé, s’il tenait tant à ma vie, par un navire de guerre ? Je suis certain que vos guetteurs serait déjà arrivé si une flotte mouillait au large de votre territoire. N’est-ce pas une preuve formelle que nous ne vous menaçons pas ? Où il vous en faut plus membres de la Confrérie ? »


L’Ange avait parlé d’une voix calme, posée, sans plus regarder Barbossa. A vrai dire, il se moquait bien de lui et de ce qu’il pouvait penser, c’était un rustre imbécile.


"J’en ai un dans ma poche, le Capitaine Barbossa le connaît, mais il n’a même pas jugé bon de vous le dire…N’est-ce pas encore une preuve de sa duplicité ? Enlevez-moi ces chaînes, et vous comprendrez pourquoi il me faisait rire avec ce titre de bourgeois. »


Il attendit qu’on lui enlève ses chaînes, avant d’avancer vers la table où se trouvait Teague Sparrow, se frottant les mains pour faire circuler le sang dans ses poignets endoloris. A quelques mètres du célèbre pirate, il sortit de sa poche une lettre cacheté aux armes personnelles de Des Nos.
Il ne se tourna pas vers Barbossa, tout entier à sa tâche, il présenta à tous le papier jauni qui ne portait…Rien, vide de toute écriture, mais une légère odeur de citron planait dans l’air qui fit sourire Sparrow en même temps que l’Ange, ils s’étaient compris.


« Pouvez-vous me passer ce chandelier » il désignait un gros chandelier en or massif, ou suintait une bougie à demi-consumée. Sans brûler le papier, il le passa au-dessus de la flamme…Sous la chaleur, des paroles apparurent.

« A ces messieurs de la Confrérie des Gentilshommes de Fortune,
Messieurs, je suis en quête de votre soutien pour la guerre qui se présente. Vous allez surement douter de mon envoyé, vous avez raison, je ferai de même si j’étais à votre place. Mais soyez assuré, par cette lettre qui engage autant mon honneur que ma tête si elle venait à s’ébruiter, que je suis mouillé autant, si ce n’est plus, que vous dans cette affaire.
Messieurs, mes propositions sont simples : revenir à l’ancien traité de l’Amiral Boisnoir, sans toutefois vous reprendre Tortuga que vous avez férocement arraché à Capétie. Je vous abandonne de bonne grâce cette terre qui est la vôtre, en espérant que vous me rendrez les prisonniers (si vous en avez) et les vaisseaux avec leurs armements si ces derniers n’ont pas brûlés.
Mais ma proposition va plus loin. Je vous offre des havres, des lieux de repos et des bases arrières pour armer vos vaisseaux, de la poudre et des boulets, des chirurgiens et des provisions, tant que vous attaquerez à outrance non pas la flotte anglaise, mais les navires marchands. Faites régner la terreur en toute liberté sur les rouges et leurs affiliés, et le roi vous récompensera grandement, en or et en argent, tout en vous laissant la liberté qui vous est si cher.
Messieurs, nous ne voulons pas des chiens comme des corsaires, mais des loups, prêt à tuer et piller tout ce qui n’est pas français !
Votre,
Charles des Nos, gouverneur des Indes, amiral de France suit l'ensemble de ses titres et son cachet personnel »

dimanche 17 mars 2013

De la course et des canonnades

La chasse avait commencé à l’aube, le petit sloop de commerce courait comme un lièvre, poursuivi par le Vicious depuis. Et pour l’heure, l’après-midi était bien avancée, l’astre solaire commençait de plonger dans leur dos, tandis qu’ils voguaient vers l’Est.

Leur proie essayait de s'échapper vent arrière en louvoyant, changeant souvent de direction, maîtrisant admirablement leur voile, donnant un ris quand il le fallait, et sans jamais faseyer. Le Vicious était bien commandé, mais plus grand il s’était approché de la petite voile en peinant, ayant du mal à louvoyer. Leur proie était passée d'un petit point blanc sur l'horizon à une coque et un drapeau de la République Batave.

Elle essaya encore de changer de direction. C’était peine perdue, vent arrière, le vaisseau du capitaine Sid allait presque aussi vite que le Pearl, et leur proie n’avait jamais pu s’échapper au cours de la longue journée, perdant peu à peu les quelques milles d’avance qu’elle avait avant de voir apparaitre le terrifiant navire pirate.

C’est pour cela que e jeune mousse sentait les nerfs de l’équipage à vif après cette longue course, tandis que sur la dunette, le pilote, le voilier et le capitaine Sid parlaient peu, concentrés sur leur chasse, donnant un ordre sec régulièrement, tandis que tous les matelots attendaient avec une certaine anxiété, ou une féroce fureur, d’attraper ce maudit Hollandais.

C’était donc ça une chasse ? Il se posait la question, des marins si courtois entre eux d’habitudes, pour des pirates, ne parlaient pas, grinçant des dents constamment, tout en aboyant s’il avait le malheur de se mettre en travers de son chemin. Pour passer le temps, certains aiguisaient leur coutelas, d’autres jouaient au dés en jetant de fréquents coups d’œil par-dessus le bastingage, tandis que les plus sereins dormaient, ou du moins, c’est ce qu’ils laissaient paraître, leurs yeux cachés par le bord de leurs grands chapeaux.

Les plus farauds essayaient de deviner ce qui pouvait bien se cacher dans ce bâtiment pour que le capitaine n’abandonne pas la course, et que leur proie faisait tout pour ne pas se faire attraper. Certains disaient du tabac ou de la cochenille, les plus avides pensaient à de l’or, Jim la Luxure lui avait dit haut et fort que c’était forcément la fille du gouverneur de Curaçao qui venait d’arriver dans les Indes Occidentales, et que ce bel oiseau de paradis allait bientôt se faire déplumer, peut-être par notre jeune mousse, ce qui avait eu pour conséquent une quinte de toux grasse des membres de l’équipage avant qu’un ordre sec du canonnier ne les renvoi à leur passe-temps.

Pour l’heure actuelle, le mousse était aux mains de l’artilleur qui lui avait fait sortir quelques gargousses de poudre qu’ils avaient fixées près des canons dans une toile cirée, pour la protéger des vagues. C’était une précaution nécessaire, du moins c’est ce qu’il lui avait expliqué, d’apporter tôt la poudre, leur proie étant à portée dans quelques minutes maintenant, pour préparer les premiers tirs avec plus d’efficacité.

C’est pour cela qu’il montrait patiemment au mousse comment enchaîner deux boulets, lui expliquant que si le mât ne tombait pas au premier tir, il y avait de fortes chances que la voilure du sloop soit ravagée et qu’il ne pourrait plus jouer avec le vent.

Tout en parlant, il avait fait charger au gamin un boulet de métal avec des billes d’aciers, enfoncé dans « la boite à mitraille », comme il appelait, par un trou qu’ils fermaient par un bouchon de plomb fondu. Le canonnier n’aimait pas cette arme, il lui avait expliqué qu’à courte portée, elle aurait pu trouer de part en part son corps qui aurait été haché sans qu’on puisse plus distinguer une partie d’une autre, ce qui avait fait pâlir le gamin. En riant, il lui avait dit que c’était les dangers du marin, mais que pour une prise, il valait mieux les garder en derniers recours, pour débarrasser un pont des enragés qui refusaient de se rendre ou faire peur à de trop bons marins, qui avaient peur des mutilations à vie que ces billes pouvaient causer à une chair humaine.

Le jeune impétrant avait demandé pourquoi ils ne comptaient pas tirer aux boulets. Là encore, le vieil homme avait ri, oui les boulets ronds étaient efficace, mais ils brisaient les coques, et un mauvais coup pouvait leur faire perdre la cargaison, si par malheur l’obus fracassait la ligne de flottaison. En revanche, il lui avait fait charger tout seul, longue opération, un petit canon de chasse portatif de quelques livres, posé à la proue dans un petit emplacement. Quand ils seraient à portée, avant de donner le drapeau rouge, il tirerait son coup, pour dire aux hollandais de se mettre en panne.

Le mousse avait demandé ce qu’était le drapeau rouge, le marin, rembruni, lui avait dit qu’il verrait bien assez tôt, mais que si les Hollandais était intelligent, ils se rendraient avant d’en arriver à cette extrémité…

dimanche 10 mars 2013

Première journée en mer

 
 
« Hey gamin, tu te réveilles enfin ? » la voix bourrue tira le jeune garçon de son sommeil pesant, quand il ouvrit les yeux dans la semi-obscurité, il manqua prendre peur devant le visage buriné où il manquait un œil, qui souriait de tout un tas de dents disparues.


« Allez n’ais pas peur, on va commencer ton apprentissage, suis moi, je te mangerai pas. Je vais plutôt t’apprendre à faire à manger à tes petits camarades »


Le gamin suivit dans la coque le vieil homme qui clopinait sur une jambe de bois, passant de la cale où sentait le vomi et la crasse à l’air pur réjouit le jeune homme, bien que le soleil le laissa coi quelques instants, le temps d’adapter sa vue.


« Viens, on va s’asseoir là » là, c’était un tas de cordes roulés pour faire une sorte de petit pouf, à côté d’un tas de patate que l’homme commença de peler après avoir tendu un couteau au gamin, jetant les peaux directement par dessus le bastingage.


« Ça c’est la base pour un gamin comme toi, tu vas aider le Vieux Bill, c’est moi si t’es un peu lent à la détente, à toutes les petites tâches comme la cuisine. Je suis le coq, je m’occupe des estomacs de nos amis gentilshommes de fortunes, à défaut de pouvoir encore servir au combat avec ma jambe en moins. » Le vieux Bill parlait pour faire passer le temps, tandis que le vaisseau quittait l’île lentement, passant devant les feux
d’un port.



« T’auras pas de soucis à te faire, mets tout ce qui te passe sous la main, on est pas chez les Lords. En mer, on a tous faim, et une cuisine robuste qui tient au ventre c’est nécessaire. Comme savoir pleins de choses. Regarde ces hommes qui tirent le cabestan sous le commandement du Gros Jean »ledit Gros Jean était un homme charpenté, qui géraient la manœuvre du gros
treuil qui permettait de faire tourner le vaisseau en chantant un charivari
comme lui expliqua Bill« Sont pas forcément marin. Y’en a qui ont fui leur famille, d’autres la Justice ou la Marine, Royale ou non. Toi je sais pas ce que tu as fait, mais si le
quartier-maitre, Gros Jean, t’as à la bonne c’est qu’il y a une raison. Son rôle, c’est commander nous autre quand le capitaine est pas là, ou au moment de l’abordage. »



Le jeune garçon regardait la manœuvre du palan, les hommes
grognaient une chanson barbare quand à la fille du bosco et les appétits du
tonnelier, il demanda quelque chose quant aux paroles de la chanson au Vieux
Bill qui s’esclaffa.



« Ma parole, t’es bien bâti pour ton âge mais ça s'voit qu'tes puceau gamin. M’en veut pas, t’es trop p’tit pour tout comprendre. Mais retiens bien, le bosco c’est
celui qui tire la gueule à la proue »


En disant cela, il désignait l’avant du vaisseau « Les hommes aiment bien le chercher, mais c’est un bon gars, il gère toutes nos provision et les navals stores avec le tonnelier. Il est en bas c’lui-là, surement en train de compter les tonneaux et se faire un peu de rhum en douce. Navals Stores ? J’connais pas le mot dans ta langue petit, mais c’est toutes les toiles, le goudron et les gréements…Ouep, tout ce sur quoi tu es assis ou qui passe au-dessus de ta tête. Les gars-là haut ? C’est les gabiers, eux leur rôle c’est ferler ou choquer les voiles, les hisser si tu veux mais le dit pas devant eux, selon le temps et les ordres du capitaine. Par exemple, en bataille, on va réduire la toile pour éviter d’emplafonner nos prises. Et oui gamin, on tire pas qu’au canon en coulant les vaisseaux, sinon comment on obtiendrait la fortune ? Ce qu’il fait le gros homme chauve ? Oui tu as raison, on tire quand même un peu avec nos pierriers et autres bombarbes pour faire peur à nos ennemis, d’ailleurs là tu vois notre maître canonnier en plein montage d’une nouvelle lumière. C’est là où tu places le boutefeu pour allumer la poudre, mais faut les changer souvent, parait que les gaz corrodent le métal…J’connais pas la science, mais si c’est mal fait, j’déjà vu des pièces sauter, avec tous leur servant réduit à l’état de pièce de boucherie. Allez frissonne pas, la bataille c’est pas notre quotidien. Tu apprendras pleins de choses, épisser les cordes, grimpers les vergues et les enfléchures, travailler au cabestan, avec ma bonne nourriture, ça te fera les muscles tu verras…Toutes les filles tomberont dans tes bras mon mignon. »


Bill continuait sa tâche, quand le vaisseau finit de tourner. La terre était déjà loin


« On a changé de cap, à vue de nez on part Sud. Mes avis que le capitaine a décidé d’aller chasser sur la Carrera de Indias, le Chemin des Indes. Là où les Espagnols font passer des tonnes d’argents doux comme la peau d’une fille et de l’or aussi chaud que leurs entrailles gamin ! Tu vois le château ? On dit aussi la poupe, ou dunette. Bref, là-haut, l’artiste, notre navigateur, le gars en chemise blanche tête nue, est en train de calculer notre route avec le capitaine Sid. Et oui gamin, on est commandé par une femme, mais le Vicious est le meilleur navire de ces eaux, et elle sait y faire. Après tout, nous l'avons élue pour qu'elle nous guide dans cet Enfer qu'est la Terre, mais si elle se trompait, nous lui enverrions la Marque Noire et elle serait jugée. Mais c'est une telle capitaine que j'pense pas qu'on en arrive là…Et bientôt tu le verras…On nous serons tous morts et pendus. Allez viens maintenant, on va aller faire cuire ces bonnes patates, le quart est bientôt fini… »
 
(petit texte qui subira certainement des modifications pour un forum RP Pirates des Caraïbes, d'ailleurs, un peu de pub ne fait jamais de mal, si vous avez aimé ce texte et que vous voulez venir jouer avec nous, c'est ici: http://piratedescaraibes.forum-actif.net/ )