dimanche 18 janvier 2015

La haine

Haïr. C’est tellement facile.
Haïr. Détester. Mépriser. Abhorrer. Abominer. Honnir. Maudire. Vomir.
Tant de synonyme pour le sentiment le plus fort, et le plus douloureux, avec l’amour.
Haïr. Laisser son ressentiment grimper, peu à peu. Le faire mariner. Le ressasser. Pérorer encore et encore sur d’anciennes blessures. Se laisser porter par ces fêlures. Jusqu’à en oublier la cause. Laisser couler le fiel du ressentiment encore et encore. Plonger dans ce flux méphitique de pus, jusqu’à se dégoûter soi-même et devoir réagir.
Explosion. La colère est saine quand elle nous prend. C’est une simple réaction. La haine, elle, est plus insidieuse.
Elle brûle, encore et encore. Comme un fer porté au rouge. Comme une maladie qui nous cloue au lit. Et puis, d’un coup, on explose comme un volcan. Pour échapper à la pression. Pour faire valser tout ce qui nous contrarie. Pour tuer cette maladie.
La haine nous pousse à mal agir. Sans réfléchir aux conséquences. Sans réfléchir à nos actes. Au pourquoi du comment.
Toute cela pour se sentir bien.
Cracher son venin. Se purger.
C’est le sentiment de la colère. Il faut l’expulser de notre corps comme on expectore une toux trop sèche qui nous secoue et nous fait trembler.
Mais la haine, ce n’est pas la colère.
Non, la haine est encore plus insidieuse que la colère violente et bouillonnante.
Elle nous réchauffe. Fièvre terrible qui nous pousse dans la vie. Purger sa haine, c’est se retrouver seul face à un gouffre terrible.
Alors, il faut haïr autre chose. N’importe quoi. Tant que ce ressentiment pervers nous aide à vivre un jour de plus. Qu’importe.
Haïr, c’est la plus belle des drogues. C’est le plus savoureux des alcools au palais. C’est le meilleur des tabacs qu’on inhale. C’est la plus délicieuse prise d’héroïne. La seule différence, c’est que la haine ne nous tue pas. Elle nous rend plus fort.
Ou du moins, c’est ce que l’on croit.
On se forge un monde obtus et fermé. Un monde où ne voit l’autre que comme un ennemi. Quelque chose à abattre, comme on tue un arbre à coups de haches.
L’autre, celui qui n’est pas nous, et semble pourtant toujours mieux que nous.
Echelle de comparaison erronée. La haine pousse à nous détester les uns les autres.
Alors on hait. Encore et encore. Et un jour. Un autre jour. Tout craque. Encore une fois.
Et on fait face alors à la vacuité de nos âmes. Au vide de nos esprits. A la fadeur de notre vie.
Alors. Que faire. Haïr encore ?

Haïr, c’est tellement facile.
 Aimer, ça l’est beaucoup moins. 

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