Il voudrait la haïr, elle, l’amoureuse qui l’a laissé sur le
carreau. Il voudrait l’oublier, la sortir de sa tête, cette image persistante,
ce parfum qui hante son nez, ce goût, salé, ses lèvres encore posées sur les
siennes. Oublier, haïr. Le peut-il ? Non, il n’y arrive pas. Dans son
sein, il brûle encore, lui, l’enfant innocent qui autrefois a aimé. Il
redécouvre, amer, cette brûlure infernale qui déchire son âme. Son cœur est une
mare de flamme, là où il s’est consumé. Pourtant…Pourtant il a de l’expérience
le petit garçon, il aurait du savoir, depuis qu’il est homme, que les femmes
font mal. Et il devrait savoir faire avec cette douleur, passer outre, s’en
servir même, pour rebondir. Du moins, c’est ce qu’il aime à dire. Mais il ment,
il ment, et ça le rend malade, toujours plus. Il s’enfonce, folie physique, il
aimerait cracher cette bile qui le hante, il voudrait ne plus souffrir de cette
flamme qui le torture constamment, dans ses tripes, dans son cœur, dans son âme.
Il voudrait retrouver cette armure de froide indifférence qu’il présente d’habitude,
se cacher, jouer aux cons. Au moins, tout passe au-dessus de lui, et il se
moque du qu’en dira-t-on quand il est comme ça. Alors que là…Là, il n’a qu’une
envie, pleurer. Mais cela ne se fait pas, cela ne se fait plus, à son âge de
petit garçon. En dehors de sa solitude, celle qui se crée, refuge artificiel
pour son corps meurtri au plus profond, là où personne ne viendra le chercher,
pas même ses amis. Sa solitude, paradis de ses émotions. En dehors, il faut
sourire, mentir, se haïr soi même tandis que le miel coule de ses lèvres. D’accord,
ses amies sont charmantes, surtout avec leurs crèves cœurs de décolletés. Mais
pour autant…Pour autant il ne peut pas les aimer, il ne veut pas les aimer. Il
a peur le petit garçon, il se dit qu’il souffre trop, il a trop souffert et
souffrira encore. Expérience mon cul. C’est toujours la même ritournelle,
tomber en pamoison, aimer et se détruire, à petit feu. C’est sa faute ?
Oui, toujours, car il ne sait pas aimer, ou du moins, s’il sait écrire, il ne
sait pas faire passer ce qu’il ressent. Sauf l’angoisse, la terreur et la peur.
L’amour, l’amitié et la joie, il ne sait pas les exprimer, sauf, tout seul,
dans son petit coin d’artifices où il se meurt de sa solitude ; là oui il
peut-être comme il est, réellement. Mais non, c’est trop dur, trop fort.
Parler, il peut le faire, mais pas en grand nombre, non, il ne se révèle dans
sa solitude qu’à une ou deux personnes, pas plus. Sinon, il ment, il jouera le
jeu. Terrible jeu. Il n’en a rien à foutre, autant passer pour un connard, et
puis on verra bien. Qui l’aime le suive.
Pourquoi ne peut-il la haïr ? L’exécrer et l’oublier.
Brûler cette douleur en brûlant ce qu’elle lui a laissé. Elle…Il lui a dit qu’il
s’en moquait bien d’elle, qu’il n’en avait rien à faire. C’est vrai. En partie.
Il ne peut pas oublier la colère, contre elle ou contre lui-même, avec elle ou
avec lui-même. Honte, colère. Il est stupide. Lui qui s’offre, toujours, en
entier, alors qu’il dit qu’il ne s’engage, jamais. Pourquoi son souvenir ne
disparait-il pas ? D’habitude, il oublie tout, si vite. Sauf l’Histoire,
celle avec un grand H, sa passion au petit garçon. Mais c’est une autre façon
de mentir, trouver un refuge commode. Tous ces personnages, amis artificiels,
il sait qu’ils ne le trahiront pas eux, jamais. Comme les amis. Les amis, les
vrais, ça ne trahit pas. Ils se testent, tout le temps, mais leur lien est
aussi dur que le métal le plus pur. Alors que les femmes…Les femmes, il ne peut
pas avoir confiance en elles. Il les aime, passionnément, et toujours il se
retrouve sur le carreau. Sa faute. Toujours sa faute, car il ne veut pas s’engager.
Il se hait lui-même, et tant qu’il ne règlera pas ça, il ne saura pas aimer. Il
n’a pas confiance en lui, il a besoin de leur confiance, et pourtant…C’est si
facile de l’enlever. Alors, le petit garçon se retrouve seul, pour de bon, seul
face à ses démons, et il se brûle, lui-même, il hurle de douleur dans son
refuge, bête blessé, et il pleure, doucement, des larmes salées, amertume du
dégout, amertume de l’ennui, amertume de la lie…La vie.
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