Obéron
Carte d'identité Anglais, vit en France
Profession Marchand d’art, mécène, receleur
Obéron est un être étrange, il peut être pris d’une colère
sans borne ou redevenir en un instant doux comme un agneau. Ce n’est pas tant
un problème de personnalité que d’émotions très fort pour celui qu’on surnomme
le Prince Fée. Retors, il peut être cruel avec ses ennemis, ou au contraire
leurs prodiguer les plus grandes libéralités, si ces dernier l’ont un peu
amusé. Ce n’est pas de la folie, mais plutôt une envie de provoquer le monde,
titiller les gens et les pousser dans leurs retranchements qui inspirent
Obéron, mais ce dernier restera fidèle en amitié. Toutefois, pour percer
l’armure de mensonge et son éternelle faconde, il faut se lever tôt et risquer
d’essuyer bien souvent des plâtres.
Pour le reste, Obéron est un esthète bon vivant, depuis que
sa chère Titiana l’a quitté, à moins que ce ne fusse lui, le prince des ombres
s’est installé à Paris où il vit comme un pacha dans un luxueux hôtel
particulier qui sert aussi à ses affaires. Il aime à se montrer dans le monde,
se glisser auprès des puissants et flatter les gens pour assurer ses éventuels
bénéfices, comme un bon joueur d’échec, ce dandy ne fera jamais rien sans rien.
Mais cet aspect de petit snob huppé cache un profond mal être. Il est las de
ces petits jeux, et aimerait bien retrouver sa compagne de toujours.
Mais il est aussi le prince des ombres, et cache toujours
une part de ténèbres derrière son sourire enjôleur. Ne serait-ce que pour ses
anciennes activités, sur lesquelles il ne s’épand guère, mais qui sont très
proche du travail qu’il demande à ses anciens amis de la pègre lorsqu’il a
besoin d’une pièce particulière pour sa collection personnelle d’œuvres d’art.
Entre lumière et ombre, comme les tableaux de Tintoret et du
Caravage qu’il affectionne tant, Obéron est un être de profonds contraste, qui
aime à s’enfermer dans sa tour d’ivoire jusqu’à ce que quelqu’un vienne l’y
surprendre. Car dans ses coffres, il aime à cacher ses petits secrets, de quoi
faire sortir des cadavres de leurs placards. Oui, le sel de sa vie, c’est
l’information, et comment la monnayer au plus offrant, en Europe ou ailleurs,
il était le prince des ombres et connaissait tous leurs petits secrets.
Particularités :
Obéron, quand il est dans son petit palais parisien, aime à
se vêtir de somptueuses robes de bains éponges et marcher pieds nus sur ses
tapis d’orient. Il passe ses journées à compulser des ouvrages d’art,
d’histoire ou sur n’importe quel sujet, en fumant des herbes opiacées dans une
grande chicha en argent polie et ternie par le temps.
Pour le reste du temps, c’est un homme d’affaire qui
s’habillera en conséquence de ses actions. Mais il raffole des vêtements de
luxe et des petits accessoires débiles, comme une canne épée, un monocle ou
plus récemment une petite pipe à opium qui ressemble à un brûle gueule et qui
quitte rarement la commissure de ses lèvres. Il fume énormément, boit beaucoup,
mais semble rarement atteint par l’ivresse.
Est-ce un signe de sa descendance sidhe ? Certainement,
dans tous les cas, on ne rate jamais cet homme élégant. Cheveux longs qui
ressemblent à la crinière d’un lion, oreilles pointues, yeux verts émeraude et
accoutrement qui sur un autre pourrait être ridicule sont sa marque de
fabrique. Même, on pourrait dire qu’il est malingre, sournois et vicieux rien
qu’en le regardant mais pourtant, cadeau de marraine la bonne fée qui lui a
offert ses dons extravagants, Obéron dégage un charme suffisant qui ferait
pâmer bien des femmes, surtout lorsqu’il sourit de sa loge d’opéra ou envoie
des assassines œillades. De fait, il ne laisse rarement les gens indifférents,
sauf sa chère Titiana qui ne lui parle plus depuis des années. Le fait est
qu’il l’aime vraiment, et garde toujours à sa main une émeraude taillée, cadeau
de son aimée et seul bijou qu’il semble porter toujours sur lui.
Du rire aux larmes en passant par la colère, le visage
d’Obéron se modifie à chacun des sentiments qu’il l’assaille et qu’il accueille
avec passion. Amoureux fou ou esthète, homme d’affaires aux crocs plus aiguisés
que ceux d’un requin, sa posture favorite restera toujours celle d’un distant
dandy, sourire aux lèvres et grands yeux ouverts sur le monde avec une
nonchalance non teintée d’ironie.
Il aime à s’entourer dans ses voyages de ses livres et de
grandes malles de vêtement, généralement porté par Huon, un grand slave beau
comme un colosse, cheveux blonds coupés raz et qui parle peu malgré un visage
d’ange plusieurs fois enfoncé par les coups de poings. Amnésique, cet homme
sert de valet et de chauffeur pour son maître, et seul Obéron sait qui est
vraiment cet homme qui atteint la trentaine. Le second compagnon du prince de
la nuit, c’est Robin GoodFellow, plus souvent appelé, non sans affection, Puck.
Ce dernier ressemble à un gamin des rues, ce qu’il est, mais n’a pas changé ni
même grandi depuis des années. Toujours vêtu de culottes courtes, il pourrait
ressembler à un page pour Obéron, si ce dernier était chevalier. C’est son
garçon de course et la personne qui le relie le mieux à la pègre, du moins
quand le maître n’a pas envie de sortir lui-même commanditer ses petites
escroqueries et autres cambrioles.
Passage sur la piste :
Obéron fumait dans son boudoir particulier, s’environnant
d’un épais nuage âcre qui faisait tousser les fées demoiselles qui entouraient
le maître de céans. Il lisait mais son attention semblait bien loin des
Liaisons Dangereuses, qu’il dévorait une fois de plus non sans penser à sa
tendre Titiana. Assis dans un grand fauteuil de cuir craquelé, il était vêtu ce
jour-là d’un complet vert profond, assorti à ses yeux brillants, jambes
croisées, il jouait distraitement, tandis qu’il tournait les pages, un petit
air à trois temps en battant de ses doigts fins la table de bois marqueté. Mais
à vrai dire, son esprit était bien plus loin, très loin de ce petit boudoir. Il
se remémorait deux semaines auparavant la soirée chez le comte Andracy, un
petit émigré polonais qui avait dans sa collection un magnifique Tintoret, mais
plus encore, ce que désirait Obéron depuis longtemps, un carnet original de la
main même du Caravage. Las pour lui, Andracy n’était pas homme à abandonner son
héritage, même contre un demi-million de franc réglé en petites coupures, et ce
diable de prince de la nuit réfléchissait à comment faire payer l’orgueil du
nobliau tout en récupérant le tableau et le petit carnet de maroquin rouge. Un
sourire dévorait ses lèvres, cynique, tandis qu’il pensait avoir trouvé une
phénoménale idée pour réussir son coup.
Trois semaines plus tard. Il avait appris que la faiblesse
d’Andracy était les femmes, et Obéron connaissait bien une ou deux monte en
l’air de génie aux lèvres pulpeuses et au giron plus que généreux. Un peu
d’artiche déposée quelque part, deux trois contacts, et le voilà lancé dans une
opération de grande envergure. Toujours dans son bureau, il fumait maintenant
en regardant les aiguilles tourner lentement. Son cœur battait la chamade
tandis qu’une rougeur égayait ses joues, déjà grisées du plaisir de recevoir le
petit colis. Mettre une greluche aux cuisses ouvertes devant le jeune noble
n’avait pas été dure. Quelques semaines de travail au corps, et voilà Andracy
fou amoureux et prêt au mariage. Las pour lui, en trois semaines, Mademoiselle
Virginie avait pu fournir des plans discrets et surtout les clés de l’hôtel où
le jeune noble prétendait étudier sous la surveillance d’un vieux serviteur
complice de ses fredaines. Envoyer Robin et ses petits amis à l’assaut de la
forteresse n’était maintenant plus qu’une question de minutes, et, à en croire
la pendule Louis XIV qui battait doucement au rythme de son balancier les
secondes, ses petits amis cambrioleurs devaient déjà être à pied d’œuvre.
Obéron venait de finir sa longue roulée qui se consumait sur le fume-cigarette
en ivoire qu’il mâchonnait doucement. D’une pichenette délicate, il envoya le
mégot rejoindre un tas de cendre déjà épaissi par une vingtaine de ses
congénères. Du tiroir de son bureau d’ébène travaillée avec art par un ébéniste
flamand pendant les guerres de religion, il tira une petite boite en argent,
travail d’orfèvre du XVème siècle, qu’il ouvrit. Dedans, il piocha après une
lente réflexion une nouvelle cigarette déjà roulée, il l’humecta d’une goutte
de cognac puis l’enfonça sur le support en ivoire, avant de l’allumer à la
flamme du quinquet à gaz qui brûlait délicatement. Encore une demi-douzaine de
rouleaux à cancer et Obéron pourrait fêter sa victoire.
« Quand on est entré Virginie ‘vai déjà ligoté Andracy.
L’était drôle, t’peux pas imaginer patron. A poil, ficelé com’un saucisson aux
quat’ mitans du lit, on a fait une
photo, j’te jure, la tête »
Puck parlait à toute vitesse, tandis qu’Obéron déballait
doucement le petit tableau et surtout le carnet en maroquin rouge. Il souriait
en écoutant le récit de son garçon de somme et ami, honnête petit gars qui le
liait à toute la lie de la société. Malgré des années d pratiques, il ne se
ferait jamais assez à son accent de titi parisien, alors que lui, le dandy, ne
pouvait se dépareiller de son accent anglais quand il parlait en français. Sa
main droite caressait, doucement, le cuir, il frissonnait presque d’extase
tandis que ses doigts communiaient avec un de ses peintres favoris par-delà les
siècles. Pauvre Andracy, stupide fat, jeune coq qui n’y connaissait rien à
rien. Bien sûr, il pourrait toujours aller à la police, mais tout le monde se
gausserait de lui et de son amitié pour les belles de nuits, surtout si les
photos allaient à quelques amis journalistes de la connaissance d’Obéron. Oui,
il avait de quoi sourire, cruel, tandis qu’il venait de récupérer quelque chose
qui lui donnait le plus grand plaisir. Doucement, d’une voix égale, il appela
Huon, et de sa douce voix d’anglais, qu’il n’avait pas besoin de pousser comme
tout être qui sait qu’il sera obéi, il lui demanda d’enlever le tableau de De
Vinci, l’originale présumé de l’homme de Vitruve, qui surplombait la cheminée
en marbre de son petit boudoir. Oui, le Tintoret irait très bien dans son
boudoir privé, là om Obéron réglait ses meilleures affaires dans une discrétion
absolue, car qui oserait entrer dans une telle caverne d’Ali Baba ?
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