Concours blanc, devoir sur table, les mots que toutes les prépas connaissent pendant deux années, finalités de leur vie khâgnale, qu’ils aiment et qu’ils haïssent, le tout à la fois. Quelque chose de vraiment exécrable, passage à tabac de l’esprit mais aussi du corps, six heures à réfléchir sur des sujets de plus en plus tordus. Philosophie, littérature, histoire…Tout se mélange dans vos cerveaux, vous avalez des tonnes de concepts, de pensées d’auteurs pour ce moment si particulier, six heures d’affilées posés sur une chaise, vous êtes concentrés, tout votre corps et votre âme tourné vers ce but ultime, la petit phrase qui tient en quelques lignes, quelques mots par fois, si ce n’est un, et vous valsez avec, vous en rêvez, vous la mordez, vous la mâchez, vous la faites tourner mille et mille fois sur la langue et dans votre tête. Ce petit bout de phrase va décider le sort de votre année, votre équivalence, elle vous prépare au grand jour, celui qu’on vous bassine depuis deux ans…Et ces épreuves qui se suivent, vous souffrez, tout votre être souffre…Inhumain traitement de la conscience, et pourtant vous vous accrochez, oui vous vous accrochez…Masochisme ? Surement, mais il y a plus que cela, oui, il y a bien plus. Il y a ce goût doux amer du travail rendu, vous savez que vous avez souffert pour écrire ces pages qui se suivent, ces dizaines de milliers de mots, et vous êtes heureux. Même si vous savez qu’au fond vous aurez une mauvaise note, même si par la suite vous savez qu’il fallait changer quelque chose…Oui, vous sentez une profonde satisfaction à chaque fin d’épreuves, vous l’avez eu, vous avez augmenté votre puissance d’agir…Vous vous dépassez vous mêmes pendant six fois six heures, vous jouez votre année, mais vous prenez plaisir à l’énergeia que vous avez trouvé, tous les concepts que vous avez mangé et remangé, vous savez enfin à quoi ils servent…
C’est cela un concours blanc, une relation d’amour haine avec une feuille, haine de la souffrance qui vous pousse au paroxysme, aux limites de la folie diront certains, mais amour du travail bien fait, de savoir que vous avez tout donné…En attendant le vrai…
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