Texte écrit au Carré-de-Soie, en plein cœur de la biennale d'art de Lyon
Odeur âcre, puissante, des corps serrés dans un bus, promiscuité
insoutenable. Tu hais le rapport obscène de ses corps entassés dans cet espace
restreint, ces effluves nauséabonds…Tu te sens souillée par ces contacts au
moindre cahot de la route.
Tu détestes ces effleurements lascifs, provoqués ou non. Tu détestes
encore plus croiser les regards de ces hommes et de ces femmes, troupeau dans
lequel se reflète la déliquescence du genre humain, de cette société corrompue
dans son cœur. Oui, tu hais ces regards où tu lis tout ce qui fait un homme, tu
ressens une pitié sans nom pour ces yeux vides et désolés, et une extrême
colère te prend lorsque tu ressens l’haleine immonde de ces sourires graveleux
et ironiques de ces jeunes hommes qui te s’appuient sur le bas de ton dos qui
se prennent pour des loups, alors qu’ils ne sont que des chacals. Tu aimerais
le gifler, le griffer, lui faire du mal ; te venger de ce système immonde où
les hommes ne sont libres que par des mots, et non en actes. Trop tard, ils
sont descendus à l’arrêt.
« Calme-toi, calme-toi » tu te répètes cette phrase comme un
mantra, mais tu aimerais tant hurler ta haine et ta frustration…C’est bon, tu
sors enfin de cette sordide prison, pour te retrouver dans l’air chaud,
suffocant d’un soir d’été. Tu luttes pourtant contre le coup pesant de l’astre
qui pèse sur les épaules de ces passants, pâles répliques d’hommes droits et
fiers. Tu t’affranchis, tu traverses d’un pas sec et vif le petit square et ces
allées taillées à la française ; sans t’arrêter, tu enchaines une, puis
deux rues ; te voilà devant ton immeuble, tu gravis les marches quatre à
quatre, tempête, évite les femmes et leurs discussions stériles ; sur le
palier, tu enfonces la clé dans la porte, que tu claques immédiatement en
entrant.
Tu te poses contre la froideur de la porte en acier, tu laisses
glisser ton sac à main le long de ton corps, et tu expires longuement, avant d’inspirer
une grande bouffée de l’air frais de l’appartement.
Tu regardes tes mails. Il ne viendra pas. Tu t’en fiches, depuis le
temps que tu n’as pas revu ta meilleure amie. Tu regardes la montre, six heures
moins le quart, tu décides de te faire couler un bain.
En attendant que l’eau ne remplisse la baignoire, tu ouvres une
bouteille de Bordeaux, que tu laisses aérer un peu, avant de verser
délicatement le liquide rubis dans le verre en cristal. Tu bois, et l’alcool te
détend rapidement. Ton bain est prêt, tu peux sentir le doux mélange des herbes
parfumées. Tu goûtes l’eau du bout des doigts, la température est parfaite, ni
trop chaud, ni trop froide. Tu te déshabilles en te mirant dans la vaste glace
de chez Targe. Striptease silencieux, pour toi seule. Tu déboutonnes un à un
les boutons de ton chemisier blanc que tu enlèves sensuellement, avant de faire
de même, plus lentement encore, avec ta jupe rouge. Tes sous-vêtements blancs, soutien-gorge
et string en dentelles blanches rejoignent au sol tes habits. Tu te regardes de
haut en bas, t’attardant sur tes seins lourds, les petites aréoles foncée sur
ta peau si clair, et ton grain de beauté noir en haut du pubis…tu souries, tu
es seule, tu t’amuses. Tu enlèves finalement les bas de soie blanche, les
faisant glisser lentement le long de tes longues jambes blanches.
Tu passes une jambe, puis l’autre dans le liquide mousseux blanc, une
fois que tu as fait entrer ton corps en entier, tu poses ta tête contre le
rebord de la baignoire. Tu es seule, loin du monde, dans ton monde. Tu es bien.
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