Tu viens de rentrer, il est midi, tu as passé une mauvaise matinée en
cours, et ton humeur est aussi noire que les nuages qui déverse une pluie
froide depuis l’aube. Tu claques la porte, enfonces la clé dans la serrure et
te barricade dans ta tour d’ivoire. Tes vêtements sont trempés, comme tes
chaussures à talon. Tu jettes ta veste rouge sur le portemanteau puis tu
dénoues délicatement la boucle de ses chaussures rouge vermillon, que je t’ai offertes
pour ton anniversaire, puis du hall de l’appartement tu entres dans la salle de
bain. Là, tu fais glisser lentement la fermeture de ta jupe rouge et la laisse
glisser le long de tes longues jambes minces, gainées dans des bas blancs. Puis
tu ouvres un à un les boutons nacré de ton chemisier blanc, de haut en bas,
dévoilant petit à petit la naissance de ta gorge, puis tes seins cachés
derrière le léger voile de ton soutien-gorge pigeonnant blanc. Au dernier bouton,
tu hésites, comme ces strip-teaseuses qui jouent les ingénues, tu te regardes
dans ton miroir, puis de tes doigts blancs tu retires ce dernier rempart, avant
de faire glisser le long de tes bras ton chemisier. Comme si la séance était
finie, tu te souries une fois face à ton miroir, te contemplant de haut en bas.
Tu t’enveloppes dans un peignoir éponge blanc crème.
Tu es bien, il fait bon dans ton appartement. Tu écoutes d’une oreille
distraite les messages de ton téléphone, tout en lançant ton ordinateur. Tu
reviens entre le hall et la pièce principale du studio, dans le minuscule
couloir qui sert de cuisine. Tu prends ta bouilloire et la met sur le feu. L’ordinateur
est lancé, tu regardes rapidement tes courriels, rien de nouveau, si ce n’est
un message de la faculté, tes cours de la semaine prochaine seront reportés. Tu
fais la moue en regardant mon message, je ne pourrais pas redescendre ce
weekend, tant pis, tu te dis que je me prive aussi, et que ce ne sera qu’un
weekend d’attente supplémentaire, nouveau rendez-vous manqué.
La bouilloire siffle, tu prends lestement dans le placard un mug, dans
lequel tu mets un thé en sachet. Tu laisses couler l’eau, qui prend
immédiatement une couleur vert brun. Tu vas à la fenêtre, tasse en main,
laissant s’infuser petit à petit le thé chaud qui embaume déjà l’air d’une
douce saveur de jasmin. Tu regardes les gouttes d’eau couler le long de l’unique
fenêtre du studio ; tu t’amuses, comme une enfant, à suivre le cours
irrégulier des gouttelettes ruisselantes en une multitude de points. Ton thé
est prêt, tu le sens, instinct acquis en faculté. Tu le bois lentement, à
petites gorgées délicates. Une fois que tu as fini, tu poses ta tasse à côté de
ton ordinateur, sur le bureau en tek noir.
Tu te couches sur le canapé lit défait. Il faudrait que tu travailles,
mais rien que l'idée t'ennuie déjà. Tu ramasses un livre que tu as jeté négligemment hier,
à moins que ce ne soit l’avant-veille, dans
l’espace restreint entre le lit et l’armoire. Tu feuillette distraitement l’ouvrage,
pour passer le temps. Tu t’endors.
Tu te réveilles en sursaut, cauchemar. Tu te lèves, rajuste ton
peignoir éponge blanc crème. Tu vas à la fenêtre. Les derniers lambeaux du
sommeil te quittent, mais quelque chose est resté sur ton visage, peur
enfantine ? Cela te contrarie, tu ris pour effacer le mauvais sort. Tu
ouvres la fenêtre, le froid te prend aussitôt, tes avant-bras nus se couvrent
immédiatement de chair de poule, mais au moins, tu te sens éveillée. Sur le
bureau à côté de toi, tu prends le paquet de Camel qui traine là, tu en prends
une entre tes lèvres rouges sang, et tu grattes une allumette. Tu inspires et
expires de longues bouffées grises, qui vont se perdre dans l’air froid en
petites volutes. Tu es bien, là,face à cette fenêtre, à attendre que quelque
chose vienne…
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